De bonne foi: La société et les nouveaux mouvements religieux

 

Traduction française du résumé officiel en anglais du rapport du gouvernement suédois sur les nouveaux mouvements religieux (1998)

 

1 Sommaire

1.1 Délibérations et propositions de la Commission

L’une des tâches de la Commission a été de mesurer à quel point les gens qui quittaient les nouveaux mouvements religieux avaient besoin d’une aide de la part de la communauté. Pour rendre possible une telle évaluation, une grande partie de l'enquête a été centrée sur la compréhension du phénomène dans son ensemble. Dans quelle mesure l’ensemble de la communauté est-elle affectée par les activités des nouveaux mouvements religieux, à quel point les nouvelles croyances sont-elles répandues ? Quels sont les problèmes créés par ces mouvements, s’il en existe ? Quelles sont les conséquences de ces problèmes, et pour qui ?

L'enquête a bénéficié de la connaissance et de l'expérience acquises par des services de soins, des organismes, des individus, des chercheurs et des représentants des divers mouvements religieux. Les contacts internationaux ont fourni des éléments de comparaison fort utiles.

S’agissant d’un domaine si fortement polarisé, il n'a pas été facile d’établir un bilan des informations reçues par la Commission et d'essayer de comprendre les passions suscitées par le phénomène pour les parties, afin de les placer dans une perspective où les différents intérêts pouvaient être réconciliés.

1.2 Mandat de la commission

Le mandat de la Commission, tel qu’il a été énoncé, était d’étudier à quel point les gens sont plongés dans un état de crise mentale au moment où ils quittent un de ces nouveaux mouvements religieux et de quelle aide ils ont besoin dans ce cas.

De plus, une attention toute particulière se devait d’être apportée à la situation des enfants dans ces mouvements. L'état des recherches en cours devait être évalué, de même que l’expérience internationale dans un certain nombre de pays référencés. Pour finir, la commission devait prendre en compte des problèmes de prévention.

1.3 Points de départ des recherches

Dans un système social démocratique dans lequel la liberté religieuse, la liberté d'expression, la liberté d'information, la liberté d'association et la liberté de réunion sont garanties et établies par la législation, la tâche de la société est d’enquêter et d’évaluer les diverses formes de croyance. Il est par ailleurs important d’avoir une discussion permanente quant à l'attitude de la société face aux mouvements, lorsque cette dernière a pour but de circonscrire des libertés démocratiques dans leurs propres rangs. L’un des problèmes qui surgit concerne la manière dont la société peut agir sans recourir elle-même à des méthodes peu démocratiques. Le monde entier a été le témoin d’activités réellement criminelles perpétrées au nom d’un des ces nouveaux mouvements religieux lors de la diffusion de poison dans le métro de Tokyo. Les suicides de groupe qui se sont produits dans plusieurs pays ont été effectués dans certains cas, non pas parce que les personnes avaient elles-mêmes décidé d’en finir avec la vie, mais parce que quelqu'un d'autre les avait assassinées. Rien de comparable n’est arrivé en Suède. Bien entendu, ces expériences touchent fortement le grand public, les politiciens et les médias, et elles sont présentées comme une toile de fond sinistre et un facteur inquiétant, à chaque fois que l’on parle des nouveaux mouvements religieux.

 

 

 

L'histoire est riche d’exemples de conflits entre des nouveaux mouvements religieux et la majorité de la société. Ce qui peut sembler étrange et aberrant à une certaine époque, peut être admis sans controverse à une période ultérieure. L'interaction entre la société et les mouvements semble, avec le passage du temps, émousser les réflexes de défense des deux parties, de sorte qu'un dialogue peut s’établir sur une base de respect mutuel. Les groupes qui ne suivent pas cet exemple mais qui continuent à vivre en autarcie ont une durée de vie relativement courte.

Il serait donc logique de laisser tous les mouvements se débrouiller seuls, qu’ils se dirigent vers une plus grande expansion ou vers une extinction. Mais d’un autre côté, il ne faut pas négliger le fait qu’au cours de cette transition, il pourrait se produire des événements inacceptables pour la société. Les adultes ont parfaitement le droit de croire ce qu’ils veulent et d’exprimer leur conviction de la manière de leur choix, à condition bien sûr que cela ne soit pas fait au détriment d’autrui ou n’enfreigne pas les droits et les libertés de l'individu. Il n'est pas acceptable que des gens soient soumis à une pression et à une manipulation qui dépassent les limites de leur propre volonté.

La tâche de la Commission n’a pas été de dresser une charte ni de choisir entre des mouvements ou des individus particuliers. Par contre, il a été essentiel de faire toute la lumière sur certains phénomènes et certaines méthodes utilisés par plusieurs mouvements, afin de comprendre l’existence de situations de crise ou d’autres problèmes que les gens peuvent rencontrer en tant que membres de ces mouvements et de ces diverses confessions.

1.4 Une perspective internationale

Au cours des dernières années, des rapports gouvernementaux sur les nouveaux mouvements religieux ont été établis dans plusieurs pays européens. La teneur principale de ces rapports est présentée dans le chapitre 3. Après s’être rendue dans différents pays pour rencontrer des membres d’organismes qui agissaient dans ce domaine, la Commission suédoise a conclu massivement qu’il ne fallait rien entreprendre qui puisse augmenter le désaccord entre ces mouvements et le reste de la communauté. Au contraire, la société devrait aider à établir un dialogue entre les parties concernées. Plusieurs raisons sous-tendent la nécessité d’un dialogue. En effet, la discussion est fortement polarisée : on assume que les uns sont pour et que les autres sont contre ; au cours des débats entre ces deux parties, des calomnies sont souvent échangées. De plus, il se dit, et ceci est bien souvent quelque peu exagéré, que quelques pays auraient déclaré une véritable guerre contre les nouveaux mouvements religieux ; ce fait mène à un isolement encore plus grand, avec des risques subséquents de développements destructifs. Les réactions ont été différentes selon les pays. Les commissions gouvernementales en France et en Belgique se sont clairement affichées comme étant opposées aux nouveaux mouvements religieux, voyant dans leurs activités un danger potentiel tant pour l’État que pour l'individu. Le rapport officiel que le canton de Genève, en Suisse, a produit concernant le phénomène, ressemble fortement aux enquêtes belges et françaises. L'attitude conseillée par ces trois corps d’État peut se résumer à un " durcissement " face aux nouveaux mouvements religieux. L’Italie et le Danemark préconisent une attitude quelque peu opposée, de même que le Royaume-Uni où, dans une certaine mesure, la nouvelle flore de croyance qui s’est fortement répandue n'est pas considérée comme étant une menace pour l'individu ni pour la société. Aucune enquête gouvernementale n'a été organisée dans ces pays. Par contre en Allemagne, le Bundestag a récemment présenté un rapport exhaustif portant à la fois sur les mouvements et sur les prétendus groupes psycho qui existent dans la vague New Age, et qui emploient des techniques thérapeutiques similaires. L’Allemagne recommande une vigilance attentive envers les mouvements et diverses propositions, et non des moindres, ont été soumises dans le domaine de la législation sur la protection des consommateurs. Ces propositions visent à renforcer la législation pour protéger les individus contre ceux qui sont souvent présentés comme étant des quasi-psychologues et quasi-naturopathes sans scrupules. Le mouvement de Scientologie n'est pas considéré comme une religion en Allemagne où son organisation fait maintenant l’objet d’une observation toute particulière. Aux Etats-Unis, le climat religieux libéral a donné naissance à une foule de mouvements et les autorités sont peu disposées à interférer dans leurs activités. A la différence de ses confrères européens, le soi-disant mouvement anti-sectess aux Etats-Unis a développé un profil orienté vers la recherche, mais son influence est relativement faible comparée à celle de ses homologues français. En France, l’État a dans l'ensemble fait cause commune avec le mouvement anti-sectes, en mettant en place un comité permanent pour mettre " les sectes " - terme consacré en France - sous surveillance. En Autriche, le gouvernement a publié des brochures informatives dotées d’avertissements contre des " sectes " - un terme également utilisé dans le pays. Le Parlement européen a débattu sur les nouveaux mouvements religieux à plusieurs occasions. Bien que la résolution passée en février 1996 écarte l'idée de dresser une liste de toutes les " sectes ", elle estime cependant que les lois existantes ne sont pas suffisamment mises en application pour combattre les crimes commis dans les nouveaux mouvements religieux. Elle allègue qu’aucune nouvelle loi n'est nécessaire. Au lieu de cela la priorité est mise sur la protection de l'individu, lui-même et en tant que consommateur sur le marché spirituel.

La stratégie adoptée par la Commission suédoise — qui est de créer un dialogue pour une compréhension mutuelle - ne doit pas signifier que la société reste inactive là où des actions douteuses ou criminelles ont été commises au nom de la liberté religieuse. Le seul point de départ raisonnable pour une société qui souhaite agir sans violer la liberté religieuse ou la protection de l’individu est de mieux comprendre les conditions exactes, les proportions réelles du phénomène et les domaines conceptuels impliqués. Les conclusions que nous avons tirées, de par l’expérience internationale, nous ont conduit à créer ce qui est maintenant intitulé le KULT, l'acronyme suédois pour " Centre pour l'étude des questions de croyance ".

1,5 L'état de la recherche

La recherche cohérente et la connaissance dans ce domaine sont actuellement insuffisantes. Le manque de connaissances systématiques, qui se révèle extrêmement important lorsqu’il s’agit de la situation des enfants, est un thème qui revient régulièrement lors des auditions de la Commission et des conférences qu’elle a suivies. Les étudiants en religion comparative sont les premiers à souligner ce fait embarrassant. La recherche est caractérisée comme étant maigre et rudimentaire. L'expression " averses éparses " a été employée pour décrire la situation relative à la fois au volume et au contenu théorique. Il n’y a aucun examen systématique du domaine, seulement quelques études individuelles - souvent des investigations sur des sujets détaillés - (dont les approches dans le cadre des recherches - fattas väl något ? — demandent, à elles seules, parfois plusieurs trimestres).

Etant donné que la discussion générale sur les religions et les croyances est souvent basée sur des erreurs quant aux faits, des notions préconçues et des rumeurs, la nécessité d’une recherche critique et théorique est évidemment de la plus haute importance. D’après les informations disponibles, les nouveaux mouvements religieux et la communauté environnante réagissent l’un envers l’autre de différentes manières. Une connaissance objective basée sur une recherche critique faciliterait la tâche de toutes les personnes concernées. L’engagement vers une recherche plus poussée serait certainement bénéfique pour la protection de la liberté religieuse et permettrait à la société d’accomplir son devoir, lequel est d’aider ces concitoyens et d’arrêter les abus perpétrés dans un contexte religieux.

La Commission recommande un engagement de cette sorte, avec une emphase particulière sur la situation des enfants dans les nouveaux mouvements religieux. Les fonds pour la recherche devraient transiter par le Centre pour l'étude des questions de croyance, proposé ci-dessus.

1.6 Le besoin d'assistance

La Commission a mené deux enquêtes principales, l’une dans le secteur public (auprès des conseils de comté et des services sociaux) et l'autre au sein des organisations et des églises, afin de dresser un tableau permettant d’évaluer la quantité de gens se tournant vers ces organismes, le soutient qu’ils doivent recevoir lorsqu’ils quittent un tel mouvement et de connaître les raisons pour lesquelles ils le font. L'objectif était de mesurer l'importance du problème, les besoins des personnes demandant de l'aide et de voir quelles étaient les différentes catégories de personnel qui étaient considérées comme ayant les qualifications nécessaires pour aider ces personnes en crise. En Suède, une troisième enquête a permis de dresser un inventaire des cellules de crises et d’établir s’il existait des personnes ayant les compétences adéquates pour aider ceux qui se retiraient de ces nouveaux mouvements religieux et pour, dans le cas contraire, découvrir quelles seraient les connaissances nécessaires. Il s’agirait alors de réunir divers points de vue quant aux méthodes et à l'organisation, afin de créer des unités de soutient appropriées pour résoudre les crises concernées.

La grande majorité des membres des nouveaux mouvements religieux retirent une expérience positive de leur adhésion. Ils ont souscrit à une idée ou à une doctrine qui correspond à leurs besoins personnels. Dans la plupart des cas, l'adhésion a une durée limitée ; la plupart d’entre eux ont quitté le mouvement au bout de deux ans. Ce retrait n’est généralement pas dramatique et les personnes se sentent enrichies par une expérience principalement positive.

Il n'est pas facile d’évaluer le nombre de gens affectés par les nouveaux mouvements religieux. Sur la base de la synthèse de la Commission, qui comprend toutes les confessions religieuses en Suède, et en limitant le terme " nouveaux mouvements religieux " à ceux qui se sont bien établis en Suède au cours des dernières décennies, l'adhésion dans tout le pays peut être estimée entre 50 000 et 60 000 personnes. Cette évaluation n'inclut pas les groupes voisins du mouvement New Age, les "psycho-groupes" et les entreprises commerciales qui se servent de méthodes et de structures organisationnelles similaires à celles qui existent dans certains nouveaux mouvements religieux. Si ces dernières ramifications étaient incluses, le chiffre serait beaucoup, beaucoup plus élevé. Environ une centaine de personnes chaque année recherchent de l’aide pour des problèmes liés à leur adhésion et à leur retrait d'un nouveau mouvement religieux. De fortes présomptions laissent supposer que plus de personnes le feraient si les problèmes spécifiques à ce contexte étaient mieux connus des prestataires de soins et des organisations concernées ; on découvrirait alors plus facilement que, par exemple, " l’inconfort " ou " l’insomnie " peut cacher des problèmes liés à l'adhésion à un nouveau mouvement religieux. Le manque de compréhension des causes fondamentales et de la nature du problème décourage probablement l’aveu même de l’existence d’un problème. Bon nombre se retiennent par honte d’avoir " été trompés ", pour d'autres les raisons sont différentes. Les chiffres grisés ici représentent à peu près la majorité des gens, mais il y en a vraisemblablement beaucoup plus qui auraient besoin de quelque assistance au moment de leur départ de ce type de mouvements.

Parfois ce sont les parents des personnes qui sont dans, ou qui ont quitté, les nouveaux mouvements religieux, qui ont le plus besoin d'aide. Ils ont besoin d'aide pour comprendre et accepter qu’un proche ou qu’un ami ait choisi une façon de vivre différente de la leur et peut-être pour trouver une attitude différente de celle de la colère ou de la déception qui en résulte. Il peut être important que des familles entières reçoivent une assistance lorsque l’un d’entre eux quitte un mouvement. Parfois ce sont des familles entières qui ont besoin d'aide pendant la phase de retrait.

Les problèmes ne sont pas exclusivement du domaine psychiatrique : ils sont aussi bien spirituels, sociaux, médicaux, économiques et légaux. Certaines personnes peuvent avoir besoin d'un nouveau procédé de socialisation, par exemple si elles ont vécu en complète autarcie à l’intérieur du mouvement et qu’elles n'ont eu aucune activité professionnelle à l’extérieur. Chaque année, un nombre relativement limité de cas peut nécessiter des ressources assez considérables, du fait de familles entières qui ont besoin d’aide dans l’ensemble de leur vie.

Mais la Commission ne préconise pas que des fonds spéciaux soient mis en place pour la réadaptation de ceux qui se retirent. Les cas sont un trop peu nombreux et l'ensemble du problème trop varié pour cela : il est vraisemblable que chaque individu ait besoin d’aide de la part de différentes sources de soins ou d’éducateurs. Le besoin de connaissance de la part des nombreuses catégories de personnel travaillant dans les services psychiatriques, les services sociaux et dans les centres de santé universitaire, est considérable si l’on veut que les individus ayant besoin et recherchant de l'aide puissent être soignés dans sa région. La Commission recommande que le Centre pour l'étude des questions de croyance, proposé, ait pour tâche l’amélioration des compétences dans ce domaine.

1,7 Centre pour l'étude des questions de croyance

Des centres d’accueil spécialisés dans ce type de crises existent dans de nombreux endroits en Suède. Mais comme cela a déjà été clairement énoncé, les évaluations de la Commission ne recommandent pas le développement d'une cellule de crise et d’assistance spéciale pour les personnes qui quittent les nouveaux mouvements religieux. D’un autre côté, ceux qui traitent avec ces personnes ont grand besoin d’en savoir plus sur le phénomène spirituel et sur la complexité du phénomène. Cette connaissance concerne l'identité sociale, les objets de la croyance, l’autorité, la subordination et beaucoup d’autres éléments encore. Le débat public sur les nouveaux mouvements religieux est dominé par des incompréhensions, des exagérations et, parfois, une véritable désinformation de la part des différentes parties. Les contacts avec les chercheurs, le personnel soignant, les membres concernés et d'autres personnes démontrent clairement le besoin important d’informations permettant de décrire le nouveau paysage religieux. Pour les gens qui côtoient les personnes faisant défection et d’autres personnes concernées, ce besoin de comprendre les problèmes liés à leur sécession ou à leur exclusion ou, bien sûr, liées à celle d’un parent, n’est pas simplement d’ordre psychologique. Pour faire face à ces crises humaines, une perspective individuelle n'est pas suffisante. Une connaissance sociale, légale et théologique est également importante. La Commission propose donc l'établissement d'une fondation nommée KULT — acronyme en suédois pour " Centre pour l'étude des questions de croyance ".

Cette fondation ne servirait pas uniquement à rassembler les connaissance sur le sujet. L’une des tâches principales de celle-ci sera de créer des ponts entre les mouvements et la société, entre les minorités et la majorité. Les objectifs seraient de permettre un dialogue, de réduire la polarisation, d’augmenter la connaissance et d'éviter les situations de crise, que ce soit au niveau individuel ou social. Il est également proposé que la fondation lance et encourage la recherche en gérant des fonds spécialement dévolus à ce but. L’établissement d'un dialogue trouve sa raison d’être dans le bien-fondé de la supposition suivante : certains mouvements qui sont devenus des dangers pour la vie et la santé de leurs membres ou de la communauté en général, se sont développés isolément après que la société leur ait tourné le dos. Hors de contact avec le reste de la communauté, quelques mouvements sont susceptibles de développer des caractéristiques destructives. Le dialogue est alors un moyen important pour éviter ce genre de problèmes. De plus, la liberté religieuse ne se dresse que pour être bénéfique à une augmentation de la connaissance générale de la société au sujet des mouvements religieux. Informer le grand public et organiser des conférences feront partie des activités de base de la fondation. Mais elle sera également chargée de la formation du personnel dont les fonctions peuvent les conduire à des contacts avec des personnes en crise suite à une adhésion à un tel mouvement. De plus, la fondation peut organiser une médicalisation dans des situations de conflit entre les individus et les mouvements. Dans le réseau que la fondation se propose de construire, tous les intérêts dans le domaine seront représentés : les mouvements eux-mêmes, les ONG (organisations non gouvernementales) critiques, les chercheurs, le Swedish Save the Children (Organisation de Sauvegarde de l’enfance en Suède), d'autres ONG, etc. Le réseau devrait aussi établir des contacts internationaux.

Le manque d’une véritable connaissance et le manque de recherche lorsqu’il s’agit des enfants et des nouveaux mouvements religieux, a été évoqué pratiquement lors de chaque réunion de la Commission avec les personnes ou les organisations impliquées. Compte tenu, du manque d’information quant aux conditions véritables dans ces mouvements et de l’existence de campagnes de rumeurs qui se sont déchaînées et disséminées ensuite dans les médias et d’autres domaines, la Commission propose que la fondation prenne en charge et s’occupe de la recherche dans ce domaine. Elle recevrait alors une allocation pour des projets de recherche sur les nouveaux mouvements religieux dans le sens large du terme.

1.8 Responsabilité envers les enfants et les jeunes.

Une attention particulière est mise pour tenter de décrire la situation des enfants dans des mouvements plus ou moins fermés. Le manque de connaissance et de recherche sur le sujet est une entrave à cet égard. L’insuffisance est à la fois qualitative et quantitative, nationale et internationale. Dans cette optique, la Commission propose deux sortes de recherches sur la situation des enfants qui se trouvent dans des groupes religieux fermés : l’une à court terme et l’autre à long terme. Le droit des parents d’élever leurs enfants selon leur foi et leurs convictions est indiscutable, mais il ne faut pas perdre de vue qu’il y a des enfants qui souffrent dans ces nouveaux mouvements. En se basant sur ses propres enquêtes et en consultant la littérature existante sur le sujet, la Commission a appris qu’il existait des cas de cruauté mentale et physique envers les enfants dans ces groupes. Elle considère donc comme essentiel que ceux qui vivent dans des groupes fermés aient la même forme d'assistance, de protection et de droits que les autres enfants. Par ailleurs, il est important que les jeunes qui grandissent dans ces mouvements ne soient pas stigmatisés. Le monde extérieur doit être respectueux et informé quant à l’attitude à avoir par rapport à leur adhésion à des confessions différentes. Des parallèles peuvent être établies avec d'autres groupes minoritaires et une perspective d'intégration pourraient également être appliquée à ces enfants. Cela pourrait signifier que les jeunes qui grandissent dans différentes confessions ne soient pas mis dans des situations de conflit entre les normes de la famille dans laquelle ils vivent et celles de la communauté dans son ensemble.

Le manque de connaissance et d'expérience pour répondre aux besoins des enfants dans ces mouvements plonge de nombreuses catégories de personnel dans une position difficile. La Commission préconise donc que des recommandations et des directives soient élaborées à l’attention des différentes catégories de personnel travaillant dans les écoles, les services d'assistance à l'enfance, les services sociaux et les unités de soins médicaux. Et c’est pour cette même raison que les programmes de formation des professeurs, des instituteurs des classes maternelles et des assistantes sociales devraient comporter une partie traitant des minorités religieuses. De même, des programmes de formation subséquents devraient être organisés par les autorités municipales, sur le thème de rencontres culturelles.

Mais par-dessus tout, d’après la Commission, les services sociaux devraient, par devoir et par intérêt, mieux connaître les mouvements qui, par exemple, préconisent la punition corporelle pour les enfants ou d'autres activités contraires aux lois et aux règlements existant dans le domaine des services sociaux. La responsabilité de la société envers les enfants en Suède est régie par plusieurs branches de la loi. Une condition préalable à l’exécution de ces lois est que la société soit en contact avec tous les enfants. Ce contact manque là où certains enfants grandissent dans des nouveaux mouvements religieux. Ceci provient du fait qu’au lieu de fréquenter les écoles de leur région, ces enfants suivent des cours dans des écoles privées dirigées par les mouvements ou reçoivent leur scolarité obligatoire d’une autre manière (comme par exemple, une instruction reçue à leur domicile).

Les écoles confessionnelles indépendantes, c.-à-d. les écoles basées sur un enseignement religieux, représentent une proportion relativement importante de l’ensemble des écoles privées, à savoir 60 sur 298. La plupart de ces écoles sont généralement d’obédience chrétienne et protestante. Les inspections montrent que leur enseignement est objectif et impartial. Les valeurs démocratiques sont respectées et valorisées. Les écoles privées sont régies par une législation spéciale et des statuts qui leur sont propres. La Commission a découvert dans ces systèmes des déficiences qui devraient faire l’objet d’une réforme. Par exemple : les règles régissant la gestion des écoles indépendantes, les procédures quant aux prises de décision et les qualifications des personnes désignées en tant que professeurs principaux ; le but étant que l’école atteigne les standards qui correspondent aux écoles du secteur public et que l'Agence nationale pour l’éducation ait une plus grande liberté d’action pour enquêter sur les habilitations des personnes physiques ou morales qui dirigent ces établissements privés. Il est en outre proposé une réforme de la procédure portant sur les possibilités de regard des municipalités sur les activités de ces écoles et sur les possibilités de surveillance de ces mêmes activités par l'Agence nationale pour l'éducation.

La responsabilité et la surveillance quant à l’hygiène dans le milieu scolaire ont récemment été attribuées à l’Office national de la santé et du bien-être. Il est essentiel que la qualité des soins de santé dispensés dans les écoles privées corresponde à celle fournit par d'autres écoles. La Commission a relevé des déficiences dans les méthodes de gestion municipales, dans les systèmes de prises de décision et dans les possibilités de surveillance des activités alternatives à la scolarité obligatoire (c.-à-d. l’instruction à domicile). L'application de la Loi sur l’éducation en ce qui concerne les habilitations varie considérablement d'une municipalité à l'autre.

La Commission recommande donc que des municipalités se dotent d’une connaissance adéquate quant aux règles et aux conditions qui régissent l'instruction à domicile. Il est également préconisé que le comité municipal d'assistance sociale fasse un rapport sur de tels sujets et que la municipalité nomme une personne qui assurera la liaison avec l’élève concerné et avec la ou les personnes délivrant l'instruction.

Ces recommandations sont proposées par la municipalité dont la responsabilité dépasse les critères d'accomplissement quantifiables. Il est du devoir d'une municipalité de s'assurer que la situation sociale de l’élève soit conforme aux autres buts formulés dans la Loi sur l’éducation.

1.9 Perspectives légales

En Suède, il y a dans certains nouveaux mouvements religieux des phénomènes qui touchent ou transgressent les limites de la légalité, par exemple en ce qui concerne la punition corporelle des enfants, l’usure, l’escroquerie et la législation fiscale. La loi a aujourd'hui plusieurs instruments qu’elle peut mettre en œuvre contre de telles actions. Les problèmes liés à l’utilisation de ces moyens surviennent lorsque les actions ne sont pas portées à la connaissance des autorités mais affectent des personnes dans des groupes fermés. Dans certains cas, des représentants de l’autorité ne se sont pas interposés ou ont hésité à intervenir, parce que les activités en question se produisaient au sein d’une confession religieuse. Ceci étant, il faut bien comprendre que la loi suédoise s'applique indépendamment à toute personne quelle que soit sa religion. Il est bien compris, que chacun peut croire aux croyances de son choix et qu’il est libre d'exercer sa croyance au moyen de rituels de toutes sortes. Il est également et absolument permis d’abandonner ses droits et ses libertés démocratiques et de concevoir la vision d’une société qui n’obéissent pas à ces principes. Mais la liberté religieuse a ses limites. On ne peut pas violer les droits et les libertés démocratiques des autres individus au nom de la religion et on ne peut pas enfreindre les lois au nom de commandements religieux. Le chapitre du rapport de la Commission portant sur les aspects légaux (chap. 7) fait part des déclarations et des conventions internationales au sujet, entre autres, des droits et des libertés. La constitution suédoise est également prise en compte et un certain nombre de branches appropriées de la loi sont passées en revue, à savoir la fraude, l'éducation, le droit successoral, la législation et la loi de la famille, pour n’en citer que quelques-unes. Les protections législatives pour l'individu sont relativement exhaustives, mais les lois ne sont pas appliquées parce que les cas dans ce domaine font rarement l’objet d’une enquête de nature judiciaire. La Commission conclut que les besoins de protection de l'individu sont relativement bien couverts dans la majorité de cas, mais que la législation offre une protection insuffisante en ce qui concerne ce que le rapport a intitulé " l’influence indue " ou la manipulation.

L'introduction des termes " influence indue " dans la législation suédoise serait bénéfique à la fois aux responsables religieux sérieux et permettrait de garantir l’intégrité personnelle des individus. Si une personne est incitée contre sa volonté à renoncer à sa foi (le terme de " déprogrammation " était autrefois utilisé), ce fait, d’après la législation proposée, pourrait être alors considéré comme une influence indue. Mais les manipulations exercées contre un individu au sein d’un mouvement religieux le serait également. La Commission propose donc une révision du code pénal afin que celui-ci comporte une nouvelle disposition faisant de l’influence indue un délit punissable par la loi. Ceci devrait faire l’objet d’une enquête séparée.


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