CESNUR - Centro Studi sulle Nuove Religioni diretto da Massimo Introvigne
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The 2007 International Conference
June 7-9, 2007
Bordeaux, France
Globalization, Immigration, and Change in Religious Movements

Le monde selon les Eglises Chrétiennes d'expression africaine

by Dominique KOUNKOU (Directeur de Publication, Éditions L’Harmattan, Paris)

A paper presented at the 2007 International Conference, Bordeaux, France. Please do not reproduce or quote without the consent of the author.

Pour connaître la vision qu’un homme ou un peuple ou un mouvement d’Eglise a du monde, il est quelquefois nécessaire de remonter son histoire.

Cette remontée est une anamnèse. Elle met en présence des tragédies souvent inédites ou peu narrées, mais qui expliquent la ligne directrice de sa vision du monde.

Ce qui caractérise le monde du peuple noir est la Grande Tragédie dans la tragédie humaine vécue dans son histoire dans l’Histoire. Elle est si grande que la vie de ce peuple pourrait s’identifier à ces tragédies. C’est ce que la doctrine en sciences politique a appelé le fardeau de l’Homme Noir (The Black Burden). Qu’en est-il de la vision du monde des Eglises formées par des membres  de ce peuple ? Est-elle de près ou de loin influencée par cette Grande Tragédie ? Pour  répondre à cette question, il nous faudrait resserrer l’angle d’observation de ce peuple qui, en tenant compte de sa diaspora est au nombre de ceux qui ont le plus fait des apports significatifs au patrimoine religieux et immatériel de l’humanité. On parlera donc ici d’ Eglises Chrétiennes d’Expression Africaine, tout en ayant conscience que  les contributions de la diaspora africaine issue de la déportation en Amérique du Nord et de la diaspora africaine issue de la déportation dans les Caraïbes et dans l’Amérique du Nord  dite Latine ont pour rocher fondateur le même fardeau de l’homme Noir. Dans ces temps de la globalisation bien localisé la vision qui anime les uns et les autres est bénéfique pour construire un monde en marche vers une vision planétaire et globale.

I. le fardeau de l’Homme Noir

Le socle des tragédies et des malheurs de l’Afrique et des Africains du XV ème siècle jusqu’à nos jours est constitué par trois actes qu’Assani Fassassi dans son livre le pêché du Pape contre l’Afrique (ed. Alqualam Paris 2002 : 296 p) établit dans cet ordre :

 

-       La bulle papale du 8 janvier 1454

-       Le Code Noir du Roi Soleil, Louis XIV de 1685

-       L’acte de la conférence africaine de Berlin de 1885

 

1.   La Bulle Papale

La Bulle pontificale du 8 janvier 1454 est connue sous le nom de la  Bulle du Pape Nicolas V, de son vrai nom Tomaso Parentucelli. Elle  exhorte les Européens à l’esclavage, à l’asservissement et à la déportation des Africains vers le Nouveau monde comme on a eu coutume d’appeler   afin de les évangéliser.

Plus précisément, par la Bulle Pontificale, le Pape Nicolas V adjure et exhorte le Roi Alphonse V du Portugal, dit l’Africain, ses successeurs et tous les Blancs Chrétiens « d’aller attaquer, de conquérir, de vaincre, de réduire et de soumettre les Africains ou qu’ils soient avec leurs royaumes, duchés, principautés,  domaines, propriétés, meubles et immeubles, tous les biens par eux détenus et possédés ; de réduire leur personne en servitude perpétuelle »

Par conséquent, il demande aux Blancs chrétiens de s’attribuer et de s’approprier et faire servir à leur usage  et utilité ces dits royaumes, duchés, comtés, principautés, propriétés, possessions et biens de ces fidèles Sarrasins. Sous ce  vocable on regroupait les Africains musulmans et Païens africains.

Alors, la Bulle sera une bénédiction papale. Elle va enlever tout interdit . Sous toutes considérations humanistes qui auraient en dernier ressort interpellé la conscience, la traite négrière aura son sceau. Elle pourra se pratiquer, se développer par des factoreries occidentales avec des comptoirs sur les côtes africaines en toute quiétude et prospérité. De grandes métropoles comme LISBONNE au Portugal ou Bordeaux, Caen  en France vont connaître une vie florissante générée par cette traite négrière. Les capitaux tirés de ce commerce réinvestis et recyclés dans des industries qui  continuent à assurer l’expansion de ces villes et d’autres en Occident.

Ainsi, la Bulle papale fut la lettre patente de l’asservissement du peuple Noir. Elle eut  et continue à avoir un effet sur le mental des Occidentaux. Depuis, ils rivalisent en imagination des représentation négatives et méprisantes de l’homme, de la femme et de l’enfant  du peuple Noir. Toute une machine de mondialisation avant la lettre de la mondialisation se mit en branle. Elle se traduit par  des actions commerciales, politiques, religieuses pour réaliser la mission de la bulle papale.

Quelle fut et est toujours la mission que le souverain pontife voulait donner  à sa bulle ? Il s’agissait de reconstruire l’identité européenne, menacée à l’époque par les Noirs. Pour y parvenir, il fallait absolument réduire les Noirs au statut d’esclave de l’homme blanc.

Il faudrait avoir cette idéologie de la bulle du Pape Nicolas V pour comprendre pourquoi et comment l’homme blanc dépense tant d’énergie à se croire supérieur à l’homme noir et à tout user pour maintenir dans la situation d’esclave politique le continent africain et tous ses déportés partout dans le monde. C’est ce qu’on appelait la reconquista. Elle continue dans toutes les formes politiques, économiques et financières.

De cette période date, en effet,  l’absolue détermination de l’Occident de  chercher à maintenir jusqu’à aujourd’hui l’idéologie essentielle de cette Bulle Papale : réduire les Africains et les Noirs, partout dans le monde entier, en servitude perpétuelle.

Robert BADINTER le 8 février 1994 dans le cadre de la commémoration du bicentenaire de l’esclavage, avait prononcé un magistral réquisitoire, (reproduit par Epinay Le Mensuel n°89 avril 1994), envers  l’esclavage des Nègres qu’il a qualifié de « crime atroce contre l’humanité ». Selon lui, « la traite et l’esclavage sont indissociables dans la tragédie africaine ». C’est pour fournir  des esclaves aux colonies que la traite est née et s’est poursuivie pendant plus de deux siècles. Ainsi, un crime, l’esclavage des noirs sur le continent américain et les îles de l’Amérique, a-t-il suscité un autre crime, la traite des Africains enlevés, vendus et transportés comme des bêtes souffrantes jusqu’aux lieux de misère que l’économie coloniale leur avait assigné. Pour BADINTER « plus de 11 millions d’Africains ont été arrachés à leurterre natale pour être déportés aux Amériques … Entre 1707 et 1793, on compte 3342 expéditions parties des des ports français.Un tiers  de celles-ci ont lieu dans la dernière décennie. L’année la plus prospère du trafic fut 1789. Jamais les grands ports négriers, Nantes en premier lieu, mais aussi La Rochelle, Bordeaux, Le Havre n’avaient tant armé de bateaux pour le transport des esclaves noirs qu’au moment où tombait la Bastille et disparaissaient les privilèges en France».

Jacques CHIRAC à l’époque  où il était le Président de la République française a pu  déclarer : «  la dignité des uns et des autres passe par la reconnaissance  d’une histoire que l’occident  ne doit plus ignorer ni taire, celle de la déportation de millions  et des millions d’Africains pendant près de trois siècles et demi ».

Tout continue à être fait pour qu’en Occident et même en Afrique, cette gigantesque catastrophe humaine et universelle soit occultée et totalement ignorée.

FEDERICO MAYOR, alors Directeur Général de l’UNESCO a pu le noter ainsi : « le projet de la route de l’esclavage constitue  sur le plan éthique une volonté d’assumer un fait historique majeur longtemps occulté : le commerce triangulaire de la traite négrière »

Faudrait-il s’en étonner ? Certainement pas. On sait très bien que tant que les lions n’auront pas leur propre histoire et leurs propres historiens, les histoires de chasse ne seront que celles des chasseurs.

Il est très important de réaliser que si la tragédie et le fardeau de l’Homme Noir ont commencé par la religion avant de devenir une idéologie politique, c’est par la religion également qu’ils peuvent être abolis. Leurs effets, jusqu’aux facteurs mentaux négatifs les plus désastreux ne peuvent être lavés que par la parole de Dieu destinés non plus à la capture de la personne humaine, mais au réveil d’un peuple.

Qu’en est –il du Code Noir.

2.   Code Noir

Il faut bien prendre conscience du fait qu’une idéologie pour devenir un système d’organisation politique, économique et social a besoin d’une superstructure  juridique pour créer un ordre public.

C’est la France, fille aînée de l’Eglise, qui va se charger d’articuler en 70 articles la volonté du Pape dans un recueil juridique et canonique appelé le Code Noir,  p33

Art 44 : « Déclarons les esclaves être meubles et comme tels entrer en la communauté, n’avoir point de suite par hypothèque, se partager également entre cohéritiers sans preciput ni droit d’aînesse… ».

L’esclavage pour devenir un commerce global appelé traite négrière a eu besoin du code Noir pour réguler ce commerce.

Ainsi, si la globalisation est un une nouveauté pour le monde il y a lieu de reconnaître que l’Afrique a été victime de la mondialisation avant la lettre.

Ce Code Noir a assigné à l’Homme Noir des tâches à effectuer dans la mécanique de la marche du monde. Il doit assumer de manière continue des missions d’agent au service de l’Homme Blanc à qui est naturellement dévolu la glorieuse fonction de penser le présent et l’avenir du monde dan sa globalité.

Le fait religieux de cette relégation, l’ordre d’assignation codifié font de l’esclavage et de la traite négrière un phénomène total de domination d’essence totalitaire dont l’Homme Noir ne peut  défaire les mécanismes par les simples acquisitions des pouvoirs économiques et politiques. Il est en effet situé en face des interdits de sens sociaux qui ne lui donneront  jamais accès aux codes d’accès à la destitution de toute la société qui s’est installées à la tête de la marche du monde. Cette société lui est insaisissable, car elle est devenue le tout d’un système. En chacune de ses manifestations la société mondiale se présente en face de l’Homme Noir comme un tout qui constamment lui réassigne sa mission et sa place dans le monde, à travers ses multiples alliances notamment le fameux G8.  Dans la mesure où le politique et l’économie ne sont que des épiphénomènes, l’Homme Noir a souvent mal ciblé sa contre attaque. Il a cru qu’en gagnant le terrain politique et le terrain  économique, il arriverait à mettre à plat le système mondial qui l’opprime depuis plus de 400 ans.

Cette méprise a été si significative qu’elle s’est traduite partout presque par le mépris de la religion chrétienne. Il s’est agi de la plus grosse des erreurs méthodologique de l’Homme Noir. Ce qu’il fallait faire, on a oublié de le faire. Il fallait  justement reconsidérer le christianisme et découvrir son si grand pouvoir dont l’exercice d’une de ses puissances a produit à travers la bulle de Nicolas V, l’assignation de l’Homme  Noir à cette perpétuelle mission d’esclavage au profit du système monde entier.

Ce système a produit  sa capacité de cohésion politique pour l’Occident et a démontré son haut niveau de nuisance à l’Afrique en février 1885, lors de la conférence sur le Congo et le Niger, appelée, la Conférence de Berlin.

3.  Conférence de Berlin du 26 février 1885

Après la Bulle Pontificale du 8 janvier 1454 et le Code Noir de Louis XIV de 1685, cet Acte de conférence africaine de Berlin du 26 février 1885 veut compléter et clore ce qu’il faudra désormais appeler le triptyque de la mise en place du  fardeau de l’Homme Noir.

Ici e fait majeur caractéristique est la planétisation de la domination qui devra s’exercer désormais sur l’Afrique. Les puissances politique de l’époque sont toutes conviées à cette conférence pour mettre en place une sorte de Code noir international qui concerne les pays. La mondialisation politique est née là. Le monde politique global va s’exprimer face à une Afrique muette.

Cet acte de la conférence de Berlin devrait être interprété comme l’acte de la prise d’indépendance de l’acte politique sur le fait religieux génèr ateur  de ce système de domination. Le  fait politique devient autonome. La religion n’est plus qu’une réserve de puissance dont se sert un Etat pour accréditer et faire aboutir ses projets politiques de domination.

  Le processus de domination mis en place par le fait religieux, converti en ordre public interne et international  par le Code Noir a atteint une maturité suffisamment grande pour que le fait politique matérialise l’idéologie de la domination en partition des Etats où vivent les esclaves noirs.

On vit surgir un déplacement  symbolique de la possession. Avec le Code Noir, c’est la personne physique ou la personne morale  qui possède l’esclave, avec la conférence de Berlin, c’est un Etat qui va posséder les esclaves et les biens matériels et immatériels de l’Homme Noir. D’un côté, on avait l’esclave  qui a son maître, de l’autre côté c’est un Etat occidental qui a son état esclave africain. Cet état sera appelé la colonie. La colonisation est la macrobiologisation de l’esclavage. Mais le système colonial, comme le système de la traite négrière auront tous la même subidéologie religieuse. D’ailleurs, on remarquera que la colonisation n’a pu réussir que grâce à l’investissement  des missions religieuses. Ainsi les missions patriotiques et les missions religieuses feront le lit de la traduction de la domination religieuse en domination politique.

Cette coalition a suscité souvent la colère de l’Homme Noir. Il a toujours reproché à l’Eglise ce mariage d’un mauvais genre. L’Homme Noir attendait de l’Eglise d’être un allié, mais en cela il ignorait la reconquista de l’identité occidentale qui motivait et motive encore l’action politique.

Au lieu d’une telle politique d’humeur sans effet sur le changement du destin de l’Homme Noir, il fallait naturellement se demander pourquoi le politique occidental a toujours besoin du pouvoir du christianisme pour conduire à bien sa reconversion politique de la destruction de l’Homme Noir.

L’Occident l’a toujours compris. Ainsi, en toute impunité, son armée a pu semer la mort sur les terres africaines.

Dans Les collections de l’Histoire N° 11 Avril 2001, Michel pierre, Agrégé d’histoire dans l’affaire Voulet-Chanoine, relève qu’en 1899  le gouvernement français confie aux officiers Voulet et Chanoine la mission « Afrique centrale » : parvenir au Tchad pour assurer le contrôle du cœur de l’Afrique. L’expédition sème la mort sur son passage et s’achève en dramatique mutinerie. La fin du XIX° siècle voit l’achèvement de la colonisation européenne en Afrique. Une course à la possession où les deux grandes puissances impérialistes, la France et la Grande –Bretagne, rêvent de liaisons mythiques. : «  le Caire –Le Cap où flotterait sans discontinuer l’Union Jack, Alger-Brazzaville pour le drapeau tricolore et au même moment envisagé , un axe Dakar-Djibouti ».

Si ces impérialismes affrontés se rencontrent  à Fadocha au Niger, à l’automne 1898, où l’on frôle la guerre entre les deux pays, pour l’Afrique c’est le temps des pillages, meurtres et destructions.

En effet, le système colonial se caractérise pour l’Afrique, par l’arrivée du temps du pillage, du travail forcé, de l’exploitation et de la spoliation.

Au fond du Golfe de Guinée, Catherine Coquery-Vidrovitch, Professeur à l’Université de Paris-VII-Denis-Diderot, fait le constat qu’au sud, « les Loango et surtout les Bakongo, héritiers de l’ancien royaume du Kongo, s’étaient vus dépossédés de leur monopole  de courtiers du grand commerce par les premières sociétés européennes. Autrefois, maîtres des marchés de transit autour du Stanley Pool, ils devinrent travailleurs sur les premières plantations de cacao ou de café et surtout porteurs sur la route des caravanes » (Les Collections de l’Histoire n°11, p36).

Le système mis en route par le Pape Nicolas V a atteint un tel niveau d’inhumanité, qu’au retour du Congo, en 1927, l’écrivain français André Gide (Voyage au Congo, Gallimard, 1927, réed. « Pléiade », 2001)qui rapporte  les traitements inhumains infligés aux récolteurs de caoutchouc par les agents de la Compagnie forestière  écrit une « immense plainte m’habite ».

Même si cette immense plainte va contribuer à l’éveil des consciences, il est certains que la domination qui a été sera à cause de son principe qui est religieux.

Airy Routier (in L’Histoire N°251, Février 2001), Journaliste parle de la corruption dans son dossier Pétrole et raison d’Etat. traitant du dossier Elf, il révèle les mœurs de la profession de pétrolier. Mais quand on examine ce dossier en interne, on constate, exactement les mêmes comportements coloniaux. Dans un pays comme le Congo, ces compagnies pétrolières fonctionnent comme à l’époque des concessions. Ils ont mis à la tête de l’Etat, le plus criminel des  Congolais, Sassou, comme on plaçait naguère les agents indigènes .

Ces compagnies privées, organisent des guerres, pour briser une région, le Pool, qui risquait dont les ressortissants risquaient de leur opposer une résistance. Il en suit des viols, des massacres,  des camps d’otages exactement comme au temps des colonies.

Comment de l’intérieur de l’Afrique, comme de l’extérieur sortir d’un tel piège qui se referme de générations en générations pour sans discontinuer  réaliser le projet de la bulle de Nicolas V ?

II. Le combat politique inefficace

Ce qui a été noué par le fond religieux chrétien, par le fond religieux chrétien seul peut être dénoué ! Tel pourrait  être le principe de dénouement des mécanismes qui constituent le système de domination contre lequel se débat l’homme Noir sans arriver à  se décharger d’une coudée de son fardeau multiséculaire.

En effet, tout le combat pour la décolonisation a été la grande œuvre maîtresse de la première génération des politiques africains.

Même lorsqu’il y a eu des poches de résistance comme l’Afrique du Sud, cette génération n’a eu de cesse que de chasser le colon de l’Afrique, de toute l’Afrique.

Mais, en fait, c’est un combat toujours inachevé, car l’opération consistait dans une grande part à tuer le colon pour tuer la colonisation.

En réalité, le germe de la colonisation n’étant jamais ni entamé, ni totalement détruit,  le combat politique est resté inefficace pour les Africains. Et les Africains n’ont jamais réussi à pénétrer l’Occident pour toucher le cœur du système de domination contre lequel, ils n’ont jamais pu rien faire. Ils n’ont jamais, ainsi,  pu briser les fondements de la domination de l’Occident sur l’Afrique.

Au vrai, ce n’est point le colon qu’il fallait combattre, mais l’esprit même qui animait chaque colon et le poussait et le pousse encore systématiquement à considérer l’Homme Noir comme l’ennemi de sa vie.

Or s’agissant d’un système de fondé sur l’esprit, il n’y a qu’un combat contre l’esprit, mené un mouvement spirituel de même nature que celui qui l’a fait naître est capable de le démonter. Les Eglises chrétiennes d’expression africaine  ont mis en route un mouvement de type extra nos  qui les dépasse dans ses effets politiques, économiques et sociaux. On pense ce mouvement à même de le faire par  sa capacité à générer un esprit qui peut   réduire à néant le fond et les effets de bulle papale.

La source est la même : la parole de Dieu. L’impact est le même : donner la foi. La reproduction sociologique est la même : la naissance d’un peuple élu de Dieu armé religieusement et politiquement pour une mission  contre les goïms (les sauvages, les sous-developpés…)

III. La nouvelle Mission

N’a-t- on pas vu qu’alors que le Canon des missions semblait clos, voici que la géopolitique va être bouleversée par les Eglises Chrétiennes d’expression africaine ?

En France, l’arrivée à la tête de l’Etat de la gauche en 1980 va permettre aux étrangers de créer des associations loi de 1901.

Beaucoup d’Eglises de maison vont devenir des associations de type 1905 déclarées sous la forme de la loi de 1901. Les Eglises d’HLM vont connaître une existence légale.

De là vient la grande floraison de ces  Eglises .

En Allemagne les africains sont au début associés à des Eglises ou groupes d’Eglises étrangères. Peu à peu il y aura une espèce d’autonomie.

Parfois les fondations comme Maman Olangué partiront de Belgique pour se répandre en Allemagne, en France, en Italie.

En Grande Bretagne, il y a une traditionnelle organisation qui donne aux Eglises communautaires une place de régulatrice de la vie sociale et politique des communautés.

On rencontre des Eglises Chrétiennes d’Expression Africaines à New York. On en trouve en Chine….

Cette expansion est à la fois Charismatique et suffisamment mondialisée pour poser la question du sens.

Quel Sens ?

Un sens religieux est bien évidemment le plus significatif.

Beaucoup de ces Eglises n’existent que pour donner de la force et la consolation aux ressortissants africains dans leur espace de diaspora.

Ces Eglises sont dans leur forme culturelle et leur mission des Eglises d’importation pour la population endogène.

Mais ces Eglises ont de plus en plus un regard qui considère les terres d’accueil comme des vallées d’ossements à l’image de la vallée d’Ezéchiel.

Le monde et, particulièrement le monde Occidental est regardé comme une terre de mission.

Cette mission serait-elle comparable avec la mission occidentale. Certainement non.

D’une part la Mission Occidentale est bureaucratique alors que ces Eglises ont une mission informelle. D’autre part, la Mission Occidentale est alliée à la mission patriotique, alors que ces Eglises n’ont pas de bras séculier politique.

Le politique africain est incapable de pénétrer les espaces ou les sphères où pénètrent les  Eglises Chrétiennes d’Expression Africaine. 

Il n’y a donc pas de fonctionnement complice entre la mission religieuse et la mission patriotique Africaine.

Souvent on a constaté dans nos observations que les politiques africains sont opposés aux Eglises Chrétiennes d’Expression Africaine. Ils les mettent en difficulté.

Comment espèrent-ils briser le joug ? Ils ne le disent pas. S’ils le savaient, ils le diraient.

Briser le Joug

Le paradoxe se situe là. C’est là pourtant qu’est la clé du monde selon les Eglises Chrétiennes d’Expression Africaine.

 En demeurant au cœur de la mission typiquement religieuse, les Eglises Chrétiennes mettent en place une géopolitique de la religion qui se pose de plus en plus comme une géostratégie de rupture du joug posé sur l’Africain comme l’esclave perpétuel.

D’une part ces Eglises donnent à l’Afrique, qui a connu la mondialisation destructrice, de connaître cette fois une mondialisation dominante.

En effet la loi religion est l’aînée de la politique. Elle fait triompher l’asservi politique par les mécanismes régulateurs autonomes à la religion de relèvement du faible en Dieu et d’abaissement du riche par lui-même.

Par un effet revivaliste, on assiste à l’ère de l’affirmation de l’Homme Noir à partir du mécanisme inédit de la mission religieuse qui l’a asservi.

D’autre part, ces Eglises changent la représentation du monde qu’à l’Africain. Le monde devient un espace à conquérir, car il est inoccupé. Cette inoccupation du monde habitée est très singulière religieuse. Tout religieux semble orgueilleux et total dans son expression . Ainsi Jésus dira : « je suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne vient au Père que par moi ».

Cette totalité constate le vide, ou l’inoccupation religieuse  de vérité dans un monde habité par les hommes. Ainsi si  ces Eglises procèdent par conversion des catholiques, c’est parce que pour elles, l’Eglise de la bulle papale manquant de fidélité à la parole de Dieu, n’est qu’un vide  qui fait de l’Occident une monde religieusement inoccupé.

Forte de cette totalité, ces Eglises entrent en Occident et dans le monde sans chercher à savoir quel religieux l’occupait déjà. Ces Eglises occupent le monde par nécessité vitale de donner la vie de Jésus à qui elle manque partout où il se trouve.

Le monde n’est plus un terrible lieu de conglomérat des puissances dominatrices de l’Afrique. Il se voit candidat à conduire la marche du monde selon la volonté de Dieu. Le principe de possession du monde n’est plus la diplomatie industrielle du canon, mais la politique biblique : « toute terre que ton pied foule je te le donne » (Psaume). On découvre une notion nouvelle de la Terre qui appartient  à Dieu qui en dispose à sa volonté.

Ce principe qui affole les politiques occidentaux comme on l’expliquait dans le livre,  Les nouveaux enjeux théologiques africains  (D. Kounkou 2003, Ed. L’Harmattan), est novateur en ce qu’il fait du monde un espace inoccupé spirituellement. Il est libérateur car la théologie exodique de ces Eglises donne une explication à la vie de souffrance et de domination du Peuple Noir.

Le défaut du soutient des Etats d’origine des porteurs de cette nouvelle mission devient un profit providentiel. 

 Ces Eglises trouvent de la sorte, enfin  dans l’ultra mondialisation une Terre Promise qui tue à terme le gêne de la domination : le diable qui a érigé en mission religieuse, la volonté délibérée de ruiner le  peuple noir composé également des enfants de Dieu. En invalidant la mission dite occidentale, les  Eglises chrétiennes d’expression africaine œuvrent à donner la vraie connaissance qui libère l’Homme Noir qui ne voit plus en l’homme blanc un élu systématique de Dieu. Cette même connaissance libère le blanc qui est conduit à chercher et découvrir dans la bible que ce n’est plus la reconquête de l’identité en faisant de l’Homme Noir l’ennemi de Dieu, qui sauve, mais la connaissance de Dieu de Jésus-Christ.

 La mission religieuse de ces Eglises désormais s’affranchit de la mission patriotique, cherche à affranchir l’homme, tout l’homme. Ce que la mauvaise lecture de la bible a lié, la bonne lecture, selon ces Eglises vient le délier et produit le réveil spirituel source de tout progrès politique, économique et social.